Un Tibet, trop patient, trop longtemps

Publié le par Angie

Un moine tibétain après avoir été molesté par la police népalaise pour avoir manifesté devant les bureaux des Nations Unies à Katmandou, le 17 mars 2008.

Le dalaï-lama, 72 ans, ancien prix Nobel de la Paix, qui vit en exil depuis 1959, prône l'autonomie du Tibet plutôt que son indépendance, une demande que la Chine rejette.

En Inde, une «marche de retour au Tibet» doit commencer lundi à l'initiative des cinq principales organisations tibétaines en exil, ont ajouté les associations. Elle traversera le pays sur 4000 kilomètres avant de rejoindre la frontière avec le Tibet pour l'ouverture des Jeux de Pékin début août.

Trop peu de résultats depuis trop longtemps
Basés à Dharamsala, comme le gouvernement tibétain en exil, ils représentent la ligne radicale de la cause tibétaine. Les leaders du Congrès de la jeunesse tibétaine (TYC) et plusieurs autres exilés ont rencontré ce mercredi à Dharamsala le dalaï lama. Leur objectif : faire le bilan, à un moment critique, de la «voie du milieu» prônée depuis des décennies par le leader spirituel.
Cette voie «médiane» du dalaï lama, c'est celle du compromis avec Pékin : la recherche du dialogue avec la Chine, la non-violence et la renoncement à la quête de l'indépendance du Tibet pour une simple autonomie. Des positions qui ne satisfont pas tous les Tibétains.
Il y a une certaine incompatibilité entre la position du gouvernement du dalaï lama et la population de base au Tibet qui demande l'indépendance, notamment chez les nouvelles générations, estime Thupten Gyatso, président de la Communauté Tibétaine de France. En tous cas, la gravité de la situation mérite que le débat soit ouvert pour faire le bilan de la politique menée et, pourquoi pas, en changer.»

Risques d'embrasements
Changer de politique, serait-ce renoncer à la non-violence? Au Congrès de la jeunesse tibétaine, à Dharamsala, on se défend tout propos belliqueux et l'on souligne la solidarité des tibétains exilés. La non-violence est une grande chose. Mais si la Chine n'entend pas la non-violence, cela forcera peut-être les Tibétains à recourir à d'autres méthodes. Il y a un vrai danger à Dharamsala.


Récents durcissements de la répression et de main mise «han»

Tout le monde s’interroge sur le lien entre ces soulèvements et le fait que la Chine se retrouve sous les projecteurs à quelques mois des Jeux olympiques de Pékin cet été. «Les Tibétains sont surtout en colère de voir comment la Chine profite des Jeux pour se présenter au monde comme un pays uni, continue Kate Saunders. Et il y a une raison plus profonde à ces manifestations: le récent durcissement de la répression sur les Tibétains.»
Pékin vient de lancer une nouvelle campagne visant à sédentariser les nomades, ce qui oblige les Tibétains à abandonner leurs terre et leur mode de vie; l’arrivée massive d’ouvriers migrants Han (ethnie majoritaire du pays) pour la construction du chemin de fer au Tibet inauguré en juillet 2006 a aussi été mal prise par les locaux.
Côté spirituel, le gouvernement chinois vient de porter un coup bas à l’un des principes fondamentaux du bouddhisme tibétain, la réincarnation. «Pékin a décrété que personne ne pourrait être réincarnée sans sa permission, explique Kate Saunders. C’est politique, il s’assure comme cela le contrôle de la désignation du prochain Dalaï-Lama.» La tension est ainsi peu a peu remontée au Tibet. Il y a d’ailleurs déjà eu des heurts entre des moines de Tongren (province du Qinghai) et des Chinois il y a trois semaines, qui avaient fini en confrontation avec la police.

Pékin ne déviera pas de sa ligne dure

La Chine a beau être sous les projecteurs des JO justement, elle n’a pas l’air de changer sa méthode de gestion de crise. «Les autorités chinoises ne réagiront peut être pas dans un bain de sang, mais il faut s’attendre à de fortes répressions, prévient Jean-François Huchet, directeur du centre d’études français sur la chine contemporaine basé à Hong-Kong. A partir du moment où la souveraineté de la Chine est mise en cause, le parti communiste n’hésitera pas à réprimer fortement, qu’il y ait les Jeux olympiques ou pas.»
Pékin a lancé un ultimatum aux manifestants: il leurs accordera sa clémence s’ils se livrent à la police avant ce lundi soir minuit (17h heures françaises). Au Tibet, personne n’y croit.


L'embrasement
Par monastères isolés et distants de plusieurs centaines de kilomètres: le Tibet et trois de ses provinces voisines ressemblent à une drôle de poudrière depuis ce week-end. Selon le gouverneur communiste de la région autonome du Tibet, «le Dalaï-Lama et sa clique» seraient derrière tout ça.
Beaucoup de gens ne veulent pas croire que ce n’est pas coordonné. Mais le Tibet est tellement surveillé qu’il est impossible de songer à un mouvement unifié. Les Tibétains seraient trop en danger si on les contactait de l’extérieur. En fait, ils s’appellent depuis leurs portables. Les gens attendent depuis tellement longtemps pour agir que quand ils reçoivent un coup de fil d’une ville soulevée, ils se disent: pourquoi pas moi?
L’étincelle aura été l’escalade à Lhassa vendredi dernier. La manifestation des moines était pacifiste pendant les quatre premiers jours, rappelle Kate Saunders, porte-parole de Campagne internationale pour le Tibet. Mais lorsque la police a tenté de la disperser, ça a rendu les Tibétains laïcs furieux, et puis l’un d’eux a mis le feu à une voiture de police… Avec l’enchaînement qu’on connaît.


Ces derniers jours, à Lhassa, certains témoignages ont fait part de lynchage par des Tibétains de chinois Han, laissés pour morts dans la capitale tibétaine. Il est difficile de savoir ce qui s'est réellement passé. Les violences étaient des actes isolés. Il est possible qu'un Chinois soit tué par un Tibétain, mais il faut rappeler que les Chinois ont tué des millions de Tibétains.
La violence des affrontements et les foyers de protestation qui continuent à se déclarer, notamment dans les provinces chinoises à fort peuplement tibétain, peuvent laisser prévoir de nouveaux embrasements. Mercredi, un millier de Tibétains, à cheval ou à pied, ont envahi un village isolé du Gansu (nord-ouest de la Chine). Ils ont tenté de s'attaquer à un bâtiment officiel et hissé le drapeau tibétain dans l'école.

Publié dans Guerres-Religions

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G
La Chine, vertu morale est spirituelle supérieure...on aura tout vu ! Si c'est pas triste...<br /> <br /> Merci Angie pour cet article
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A
<br /> merci à toi aussi d'être si fidèle<br /> A mon avis plus les JO approchent et plus la Chine va nous montrer combien elles est 'spirituelle' !!! Il y aura du choix pour de prochains articles : le silence imposé en Chine, les conséquences<br /> sur les étrangers travaillent en Chine, le boycott chinois sur l'information ... rien de spécial labas en fait ;-)<br /> <br /> <br />